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LE GROUPE 

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On entendrait presque crisser les sillons. Écouter Rico, c’est se replonger avec délice dans la discothèque familiale réunionnaise. C’est se repasser de vieux films super 8, sentir à nouveau le parfum des épices s’échappant d’une cuisine voisine. Souvenirs de kadok* sous le pied de badamier, de soirées étudiantes, de kabars amicaux. Écouter Rico, c’est sourire à cette créolité intacte malgré le béton, le temps qui passe et mondialise.

 

Le double-album s’appelle Rico. Il aurait pu s’appeler Bato Fou, Kala, Nasion … autant de titres de chansons de Ziskakan qui ont accompagné et accompagnent encore la vie de plusieurs générations de Réunionnais. Puisqu’il fallait choisir un titre à ce double-album, premier d’un diptyque retraçant 35 ans de carrière du groupe mythique, Gilbert Pounia, son charismatique leader, a donc choisi Rico. Écrit par Bernard Payet en 1978, ce morceau figure sur le tout premier album de Ziskakan, vinyle emblématique d’une époque où le groupe militait pour la reconnaissance du maloya et de la culture créole, et compte parmi ceux réclamés par le public lors de sa tournée réunionnaise en 2014.

 

Car après avoir fait voyager sa musique autour du monde et obtenu la reconnaissance de l’autre côté de la mer, c’est à la maison que Gilbert Pounia a souhaité souffler les 35 bougies de Ziskakan. Pendant un an, le groupe a écumé les scènes réunionnaises, des théâtres aux cafés concerts, pour le plus grand bonheur d’un public souvent familial. C’est face à l’engouement des plus jeunes pour les anciens morceaux que Gilbert Pounia a souhaité enregistrer cet album live.

Un album qui semble concentrer l’âme du Ziskakan d’aujourd’hui : authentique, familial et lourd de sens. Enregistré sur de belles scènes (Téat de Saint-Gilles, Théâtre des Sables, festival Péi Bato Fou à Chassieq, festival Liberté Métisse) comme dans des cafés concerts plus intimistes (Cobis, le Kalou, Oh ! Comptoir des filles), Rico imprime sur CD (et vinyles, prévus en édition limitée) la direction prise depuis un an par le groupe de Gilbert Pounia : retour aux essentiels après de nombreuses années d’échanges et d’expérimentations riches de rencontres.

Le Ziskakan 2015 flirte avec l’acoustique en petite formation, comme pour donner encore plus de poids à la poésie créole qui émaille son répertoire. Déjà amorcée sur le précédent album, 32 Desanm, cette sobriété musicale donne une autre couleur au répertoire revisité sur Rico et semble nous faire redécouvrir le sens de certains morceaux, pourtant mainte fois entendus. Comme si Gilbert Pounia souhaitait ici transmettre l’émotion des mots et des mélodies à l’état brut.

 

Et ça n’est certainement pas un hasard si sa nouvelle formation accueille de jeunes musiciens, comme pour mieux signifier la main tendue vers cette génération que Gilbert Pounia a longtemps accompagnée en tant qu’éducateur et avec qui il continue à entretenir des liens forts.

Autour de Gilbert Pounia, c’est donc la « famille » musicale qui s’exprime sur Rico : son fils Wasis (basse, percussions, flûte et voix), Daniel Riesser, complice artistique avec qui il s’est découvert récemment un lien de parenté (guitare, chœurs et basse créole) et son frère Frédéric Riesser (batterie, percussion et mélodica). Et c’est un autre complice, Gérard Paramé, qui assure la réalisation et la direction artistique de cet album mixé par Yotam Agam du studio Earthsync à Chenaï.

Comme toujours avec Gilbert Pounia, cette collaboration est avant tout le fruit d’une rencontre humaine et d’une histoire d’amitié. Séduit par la musique et l’esprit du Earthsync studio en découvrant le DVD du Laya Project, Gilbert Pounia s’est lié d’amitié avec Yotam Agam lors de l’une de ses visites à la Réunion. Le producteur réalisera ensuite avec Patrick Sebag l’album 32 Desanm de Ziskakan.

 

Les rencontres et les liens forts construits au fil de la carrière du groupe se lisent aussi dans le choix (difficile à faire, aux dires de Gilbert Pounia) des morceaux composant Rico. Trois titres écrits par l’écrivain Axel Gauvin, deux de Bernard Payet, deux de Carpanin Marimoutou, un de sa fille Maya Kamaty, un de Serge Ulentin, un autre de Dev Virahswamy, un du conteur Sergio Grondin et des collaborations de Michel Ducasse et Gillette Staudasher-Valliamé côtoient ainsi ceux de Gilbert Pounia. Et là encore, il est question de famille : celle des amoureux de la langue créole et de sa poésie.

 

Car si les combats de Ziskakan semblent moins virulents qu’à ses débuts (évolution de la société réunionnaise oblige), son militantisme reste intact. Il revêt aujourd’hui les habits de la transmission, mû par un rêve cher à Gilbert Pounia : que la poésie créole entre dans les écoles et les familles. Et c’est à un poète, Rieul Debars, que Gilbert Pounia dédie cet album, concentré de 35 ans de rythme, de combats, d’émotion et de verbe coloré et imagé. Trente-cinq ans d’âme créole en somme.

 

Isabelle Kichenin

 

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* Kadok : jeux d’osselets

We could almost hear the grooves squeaking. Listening to Rico is taking you back delightfully in Reunion family’s collection of records. It is also playing again some old Super8 films, smelling again the perfume of spices escaping from a kitchen next door. Memories of “kadok”* under the tropical almond tree, of student nights, of friendly kabars*. Listening to Rico, it’s smiling to this untouched creole world despite concrete, time passing and globalisation.

 

This double album is called Rico. It could have been called Bato Fou, Kala, Nasyon… as many titles of Ziskakan songs which have accompanied and are still accompanying the life of several generations of Reunion people. Since a title needed to be chosen for this double album – the first one of a diptych recalling 35 years of career of the mythical band – Gilbert Pounia, its charismatic leader, decided to choose Rico. Written by Bernard Payet in 1978, this song can be found on the very first album of Ziskakan, a vinyl record emblematic of a period when the band was militating for the recognition of maloya and of creole culture. This record is also part of those claimed by the audience during the Reunion Tour in 2014.

After having made his music travel all around the world and found recognition beyond the sea, Gilbert Pounia wishes to celebrate the 35th anniversary of Ziskakan at home. So, during one year, the band has been playing on the stages of Reunion Island, from the theatres to the music cafés, for the happiness of family audiences. Face to young people’s enthusiasm for the old songs, Gilbert Pounia decided to record this live album.

An album which seems to gather the very soul of Ziskakan today : authenticity, family, meaning. Recorded on beautiful stages (Téat de Saint-Gilles, Théâtre des Sables, Péi Bato Fou Festival in Chassieq, Liberté Métisse Festival) or in more intimate music cafés (Cobis, le Kalou, Oh ! Comptoir des filles), the CD album Rico (and the vinyl records in limited edition) sets the direction taken by Gilbert Pounia’s band for a year now : going back to what is essential after years and years of exchanges and experimentations filled with encounters.

The 2015 Ziskakan flirts with a simple acoustic outfit as if to give more weight to creole poetry which sprinkles its repertoire. This musical sobriety which was already present on the previous album 32 Desanm gives another flavour to the revived repertoire on Rico and seems to make us rediscover the meaning of some songs, though we’ve heard them so many times. As if Gilbert Pounia wanted to convey the emotion of the untouched words and tunes.

 

And it is certainly no mere coincidence that his new formation is composed of young musicians, as if to imply even more that Gilbert Pounia has been holding out a hand to this generation that he has accompanied for a long time as an educator and with whom he is still having strong ties.

 

Around Gilbert Pounia, it is more particularly the musical “family” which is showed on Rico : his son Wasis (bass guitar, percussions, flute and vocals), one of his artistic partner Daniel Riesser, with whom he recently discovered a family kinship (guitar, choirs, creole bass guitar) and his brother Frédéric Riesser (drums, percussions and melodica). Another partner, Gérard Paramé, who takes care of the achievement and the artistic direction of this album mixed by Yotam Agam from EarthSync Studio in Chennai.

Like always with Gilbert Pounia, this collaboration is first of all the result of a human encounter and a friendship story.

Fascinated by the music and the spirit of EarthSync Studio by discovering the Laya Project DVD, Gilbert Pounia became friend with Yotam Agam during one of the latter’s visit in Reunion Island. Yotam Agam will then produce the album 32 Desanm of Ziskakan with Patrick Sebag.

The encounters and strong ties built throughout the band career can also be seen in the choice (apparently difficult to make, says Gilbert Pounia) of the tracks composing Rico. Three songs written by the writer Axel Gauvin, two by Bernard Payet, two by Carpanin Marimoutou, one by his daughter Maya Kamaty, one by Serge Ulentin, another one by Dev Virahswamy, one by the storyteller Sergio Grondin and some collaborations of Michel Ducasse and Gillette Staudasher-Valliamé share those of Gilbert Pounia. And there again, it is about family : the family of lovers of creole language and of its poetry.

 

Because if Ziskakan’s fights seem less virulent than in his early days (due to the evolution of Reunion society), his activism stays untouched. Today it dresses up in the clothes of transmission, moved by a dream cherished by Gilbert Pounia : that the creole poetry would be part of the schools and of the families. And it is to a poet, Rieul Debars, that Gilbert Pounia dedicates this album, a perfect fusion of 35 years of rhythm, fights, emotions and a colourful and vivid language. In short, 35 years of creole soul.

 

Isabelle Kichenin

 

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* play Kadok : play jacks

 

* kabar : traditional festivities lasting day and night

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